Les berges du lac Daumesnil, dans le bois de Vincennes, sont mon lieu préféré de l’Est parisien, mon refuge, mon recommencement. Presque tous les samedis matin, je vais me promener autour du lac. La végétation scande les rythmes des saisons. Les nombreux oiseaux, des canards, des cygnes, des oies, des poules d’eau, mais aussi les mystérieux paons et les exotiques perruches vertes, passent l’année sur les rives et sur les deux îles centrales. Le plus souvent, j’apporte un café et une brioche au chocolat, ce petit-déjeuner qui est mon prélude à la balade.
Le lac Daumesnil est un lac artificiel de faible profondeur, aménagé dans les années 1860, situé à l’ouest du Bois de Vincennes. Inspiré des jardins à l’anglaise, il est le cousin des autres parcs parisiens de l’époque haussmannienne, le parc des Buttes-Chaumont et le parc Montsouris. Il comporte deux îles centrales, les îles de Reuilly et de Bercy, sur lesquels s’élève un petit temple néo-grec. Les berges ont été plantées d’une multitude d’arbres. Des barques sont disponibles -sauf en hiver- pour une promenade en bateau. La verdure et la tranquillité sont mes raisons de revenir chaque semaine.
En 1931, les berges du lac Daumesnil ont accueilli l’exposition coloniale internationale. Sur le modèle des expositions universelles, cette exposition visait à glorifier l’empire colonial français, la « Grande France ». Une multitude de bâtiments, de pavillons et de « villages » se faisait les vitrines des différentes possessions coloniales françaises.
Il y a quelques semaines, des dizaines de panneaux explicatifs ont été ajoutés sur les bords du lac. Je les lis, alternant l’indignation et le rire devant l’absurdité de la propagande coloniale. 33 millions de personnes se sont rendues sur le site de l’exposition, la plus fréquentée du 20e siècle dans la capitale. Seulement 5 000 personnes ont découvert la « contre-exposition », organisée par des intellectuels de gauche et dénonçant les exactions du modèle colonial français. Je photographie les reproductions des affiches d’époque. Elles traduisent l’ambivalence du regard des artistes. Certaines sont drôles, d’autres sont abominables, quelques-unes capturent un peu de beauté.
Je respire le parfum des pins sous le soleil de juillet et je pense à ce mois de juillet de 1931, où les Parisiens venaient assister à un spectacle sons et lumières sur l’île de Bagdad (l’île de Reuilly renommée pour l’occasion), faire une promenade à dos de dromadaire, et observer les « indigènes » déplacés à Paris pour cette apologie de la colonisation.
L’empire était aussi artificiel que le lac Daumesnil.
Je reprends ma promenade. Autour du lac, les pavillons, palais et « villages » ont disparu depuis longtemps. Au niveau de la Porte Dorée, il reste une statue gigantesque de Vercingétorix et l’ancien musée des colonies, devenu musée de l’histoire de l’immigration.
À Paris, il n’y a pas de lieux sans histoires, ni d’Histoire sans lieux. Je reviendrai.
Tu nous donnes vraiment l’envie d’aller faire une promenade là, avec toi! Je vais essayer d’y aller la prochaine fois que je serai à Paris. Bonne journée Caroline.🙋♀️
Très agréable cette ballade parisienne merci Caroline il y a longtemps que je ne suis plus retourné à Paris à bientôt des bises
Merci Francine ! C’est toujours mon idée, faire découvrir le Paris que j’aime 🙂
Merci Yannis et à bientôt sur le blog 🙂