Je marche sur une plage bretonne en fin d’après-midi. Le murmure du ressac accompagne le livre audio que j’écoute en balade. Sur le chemin du retour, mes yeux sont aspirés par l’Atlantique. L’océan et le ciel sont du même bleu, l’horizon s’efface, il ne reste que le tracé beige du sable. Les voiliers et les îlots flottent dans l’azur.
Dans le monde rétréci, la mer me manquait. Quand nous traversons à pied le boulevard périphérique ma sœur dit que les voitures sur l’asphalte imitent le bruit des vagues. Quand je me promène sur les quais de la Seine, le port du Havre m’appelle vers le large. La mer me manquait. La Méditerranée au cœur. Celle des vacances. La Méditerranée de Barcelone, celle de mon ancien quartier ou des dix minutes en train, au choix emprunter la Rambla de Poblenou ou prendre le Rodalies vers Badalona. L’Atlantique, le Pacifique, l’Océan indien, aussi.
Depuis le début de la pandémie, je n’ai pas passé de frontières. À l’exception de Nantes et ses environs, je suis restée au nord de la Loire. Mais quand j’ai quitté le 11e arrondissement, c’était vers la côte atlantique, en Loire-Atlantique, en Normandie, en Bretagne. La semaine dernière, j’étais dans les Côtes d’Armor. Avec la connexion Wifi, mon activité professionnelle s’est maintenue sans discontinuer. Mais le décor était différent. Après les rues de Paris, la Bretagne.
Je découvre une station de la côte bretonne qui dans les années 1920 se rêvait la nouvelle Deauville. De cette époque, il reste des villas, des hôtels au look rétro et les pins. Pluie ou soleil, à toute heure du jour, je marche sur la plage et sur les promenades de bord de mer. Je remplis mes poumons de l’odeur des pelouses fraîchement tondues et de l’air iodé venu du large. Aucun poisson venimeux ne se cache sous le sable doré qui crisse sous mes pieds. J’admire le pourpre de la bruyère en fleur sur les falaises. J’observe les ballets incessants des mouettes et des goélands. Je contemple les frêles fleurs accrochées aux dunes qui dansent dans le vent. Le soleil réchauffe ma peau anticipant les baignades de l’été.
Dans le monde rétréci, j’ai appris à trouver la beauté partout. Alors quand le ciel et l’océan se confondent dans le même bleu, je m’arrête pour admirer l’effet sur le paysage. L’horizon a disparu. Les bateaux blancs et les îlots en pierre sombre nagent en apesanteur. Le sable demeure. J’ai une seule certitude, je reviendrai sur la côte atlantique. Mon billet de train pour Nantes dans quelques jours n’est pas une illusion d’optique.