« Il fait aussi chaud à Madrid qu’à Barcelone. La chaleur est humide à Barcelone, l’air est beaucoup plus sec à Madrid » explique un journaliste sportif barcelonais qui a pris l’AVE (le TGV espagnol) pour venir enregistrer un programme dans la capitale. « Tu ne nous apprends rien, tu sais » répliquent à l’antenne ses collègues madrilènes, goguenards. Leur échange verbal est plein d’humour. Sauf qu’ils enregistrent leur programme le dimanche 12 juin, qu’il fait 40 degrés à Madrid, une température digne de la fin du mois de juillet.
J’écoute leur émission le lundi midi depuis un parc parisien. Je déjeune dans le parfum des lavandes, à l’ombre des arbres. La température n’atteint qu’une petite vingtaine de degrés, une belle journée avec du soleil et quelques nuages et un peu de vent, un temps estival pour Paris. 40 degrés sont attendus en fin de semaine. Si je souris de leur comparaison entre le xafogor barcelonais et l’été madrilène, c’est parce que je les ai vécus.
Dans le métro, je lis Le peuple de l’abîme (The people of the abyss en version originale), un essai de Jack London publié en 1903. Loin des grands espaces de l’Ouest américain et canadien, le journaliste et écrivain examine les conditions de vie des habitants des quartiers les plus pauvres de Londres, ceux du East End, alors que la reine Victoria vient de mourir. Il évoque les quantités effroyables de « suie et d’hydrocarbones goudronnés » qui s’abattent sur la ville.
Quand j’étais gamine, en Argentine, nous nous préoccupions du trou dans la couche d’ozone au-dessus de l’hémisphère sud.
La chaleur monte progressivement à Paris, je ferme mes volets et je me protège de la chaleur. Les présentateurs de la météo ne disent plus « il fait beau » mais « nous subissons le réchauffement climatique ».
J’écoute le chanteur de country Wilder Woods décrire un nuage noir sur nos têtes et un climat fabriqué par l’homme, une météo synthétique. Il chante “there’s a black cloud hanging […] and it’s man-made weather”.
Je lis un article de la BBC sur le trou dans la couche d’ozone. Au milieu des années 1980, des scientifiques avaient mesuré qu’un tiers de la couche d’ozone avait disparu de l’atmosphère au-dessus de l’Antarctique. Cet amincissement représentait un risque pour les animaux et les plantes, et aussi pour les êtres humains, menacés par des cancers de la peau et par des cataractes plus nombreux, liés à l’exposition aux rayons du soleil. Un protocole international a été négocié et signé. En 2009, 98% des substances chimiques qui provoquaient la disparition de la couche d’ozone n’étaient plus commercialisées. Dans une trentaine d’années, la couche d’ozone aura retrouvé toutes ses propriétés protectrices.
Et je me prête à rêver. Que je lirais un article similaire dans trente ans. Que cette météo synthétique sera en rémission. Que quelqu’un cherchera -comme moi cet après-midi sur la couche d’ozone- « qu’est-il advenu du réchauffement climatique ? ». Et lira des bonnes nouvelles. Qu’après les nuages noirs artificiels, viendra l’éclaircie.
Image par Greg Montani de Pixabay
J’ignorais que la couche d’ozone n’était plus un souci. En revanche le réchauffement climatique se fait sentir de partout et je suis surprise du peu de réactions. Comme une fatalité qu’on ne pourrait combattre.
C’est sûr. J’avais lu un article intéressant de Michael Pollan (journaliste qui écrit beaucoup sur les aliments et l’agri-business) sur le fait que la complexité des interactions à l’échelle mondiale décourage les actions individuelles car tout est dilué dans des chaînes.