Quand les marchés boursiers chutent, les épargnants achètent des métaux précieux et des actions d’entreprises dont les produits se vendront toujours. Ils cherchent la sécurité, des valeurs refuges.
Dans le désastre de l’élection présidentielle française, je relis le carnet bleu où je gribouillais mes pensées il y a vingt ans, dans un printemps qui ressemble à celui-ci. Je capture quelques phrases qui plantent le décor, mon décor. Je déplorais la montée progressive des idées toxiques. Je confiais avoir eu peur, avoir pleuré, être persuadée que mon pays ne m’aimait pas. Je décrivais en quelques phrases les manifestations contre l’extrême droite entre les deux tours de l’élection, avoir vu un drapeau français et algérien réversible flotter aux pieds de la grande statue de la place de la Nation. Sur la page, griffonnés au crayon de papier, ces quelques mots : « Je n’ai qu’un pays. Et Paris ». Mes valeurs refuges.
Ma sœur m’accompagne pour une de nos balades sur la Promenade Plantée. Nous croisons promeneurs, sportifs et travailleurs du quartier à l’heure de la pause déjeuner. Lau distingue les azalées et les rhododendrons aux fleurs fuchsias, roses et blanches. Les premières roses et les délicats iris fleurissent le long des bassins. Les lilas blancs et violets se laissent admirer et un parfum de chèvrefeuille flotte dans l’air. Dans le couloir de verdure formé par la petite forêt de bambous, nous quittons Paris pour une fraction de seconde. La nature est notre valeur refuge.
Plus tard, je m’installerai pour regarder le dernier match de mon équipe de football. Ces derniers temps, les regarder garantit des émotions fortes, la menace de l’élimination ou de la défaite précédant la gloire de la victoire. Le football a ses règles constantes, ses rituels immuables, son calendrier. Prévisibilité et imprévisibilité. Match après match, en 2022 comme en 2002, mon club est une valeur refuge.
Je fêterai la journée mondiale du livre le samedi 23 avril. La date a été fixée en hommage aux géants Shakespeare et Cervantès, morts tous les deux le 23 avril 1616 -selon deux calendriers différents- et elle correspond aussi à la Sant Jordi (Saint-Georges) en Catalogne, où, selon la tradition établie depuis les années 1920, les gens s’offriront des livres et des roses. La littérature et les fleurs sont mes valeurs refuges.
Image de fiquetdidier1 de Pixabay