Les ondes
En août 2019, je publiais Lettres de Barcelone, regroupant la centaine de textes écrits et envoyés à ma famille et mes amis pendant 3 ans d’expatriation à Barcelone entre mars 2016 et février 2019. Près de 400 pages, une carte de la ville dessinée par ma sœur et les coquillages rapportés des plages barcelonaises comme seule photo d’autrice.
La publication du recueil a renforcé la connexion que la majorité de mes proches effectue entre l’écriture et moi. Ils avaient constitué les premiers lecteurs des textes et ils ont ensuite lu le livre. Ainsi, certains amis me citent des anecdotes qu’ils ne connaissent que grâce à la lecture des Lettres et d’autres me confient l’avoir rouvert pour préparer un long week-end à Barcelone. Et cette lecture familiale et amicale continue : mes cousins les plus jeunes et des amis découvrent encore les Lettres.
Je suis contente d’être lue par ce cercle de proches, mais aussi par des lectrices et lecteurs qui ne connaisse que le nom de l’autrice sur la couverture, et rien de moi par ailleurs.
Le livre a été une excellente carte de visite, favorisant les rencontres, comme celles avec la romancière et autrice de livres de voyage en camping-car Carine Poirier, les chroniqueuses littéraires Catherine Perrin et Eve Lyne et les autrices Céline Fuentès et Charlotte de Jong. Céline et Charlotte ont participé, avec deux amies de Barcelone, à l’écriture d’un recueil de nouvelles collaboratif inspiré de Barcelone, Des roses et des livres.
J’ai prolongé Lettres de Barcelone en publiant Lettres de Paris, la compilation des textes écrits entre mars 2020 et mars 2023, alors que je continuais ma pratique d’écrire un texte court par semaine. J’ai aussi traduit Lettres de Barcelone en espagnol -avec la relecture avisée d’une amie espagnole pour éliminer les gallicismes- et je pense que je traduirai le livre en anglais.
Ce site web est aussi une résultante de Lettres de Barcelone, puisque je l’ai créé au moment où je publiais le livre. J’avais compris en rejoignant la communauté d’auteurs indépendants active sur Twitter que créer et animer un site d’auteur était une étape importante de la promotion de mon livre.
Mais peut-être le plus grand impact de la publication des Lettres a été de réaliser à quel point l’écriture faisait vraiment partie de ma vie. Quand j’ai décidé de réinventer ma carrière fin 2020, j’ai assemblé un puzzle où l’enseignement, la vie associative et l’écriture occuperaient plus de place. Ce que je constate : j’ai plus de temps pour écrire… mais j’ai surtout plus d’énergie, plus de disponibilité mentale, plus de place… Et même si aucun projet majeur d’écriture n’a encore démarré, j’ai posé les fondations.
Vie publique, vie privée, vie secrète
Gabriel García Márquez disait “nous avons tous trois vies : une vie publique, une vie privée, une vie secrète. [Todos tenemos tres vidas: la pública, la privada, la secreta].”
L’écriture occupe une place de choix dans ma vie secrète. J’écris toujours des textes qui ne sont pas destinés à être lus par d’autres yeux que les miens. Comme lorsque j’avais 15 ans et que je gribouillais des lignes au crayon dans des petits carnets bleus.
Il a fallu des années pour que quelques proches lisent mes premiers projets de romans et de nouvelles écrits pour le Nanowrimo, et encore plus de temps pour qu’un cercle relativement restreint soit destinataire de la série d’e-mails qui deviendraient Lettres de Barcelone.
J’ai donc pris facilement la décision de publier sous un pseudonyme. Mon alter ego, l’autrice Caroline Leblanc, ne fait pas partie de ma vie publique. Je mentionne parfois l’écriture parmi mes hobbies, dans la liste des activités que ma situation professionnelle rend possible. J’en dis rarement plus. Beaucoup de personnes avec qui j’ai sympathisé ces dernières années ne savent rien de Caroline Leblanc.
J’ai toutefois écrit, sans pseudonyme, au CDI de mon ancien lycée et à une association qui collecte biographies et autobiographies de particuliers, pour leur proposer d’inclure Lettres de Barcelone dans leurs bibliothèques respectives. Dans le secret des échanges d’e-mails, j’avançais à visage découvert.
Et sur Internet, ce lieu qui brouille les lignes si clairement établies par García Márquez, je publie des récits de fanfiction sous un autre pseudonyme. Mes histoires sont lues par des centaines de lectrices et de lecteurs, pour la plupart autrices et auteurs également.
Ce sont leurs encouragements et leurs compliments qui maintiennent vivace ma confiance en ma plume, même si j’utilise, comme point de départ, les personnages et les décors créés par d’autres. Et c’est l’adrénaline qui court dans mes veines quand je suis inspirée, les doigts sur mon clavier et les discussions entre les personnages dans mes oreilles, qui me sert de boussole.
Dans ma vie publique, dans ma vie privée et dans ma vie secrète, j’écris.
Image par Rony Michaud de Pixabay