Des expatriés (pas) comme les autres

Je ne sais pas où j’étais quand j’ai lu cet article dans la presse espagnole. Etais-je debout dans une rame de métro ou assise dans mon salon ? Je ne me souviens plus. Ce qui est sûr, c’est que mon père me l’a renvoyé quelques jours plus tard. Un journaliste décrivait l’acclimatation à Paris du footballeur Leo Messi. Nous avons lu une description de Castelldefels, la ville-plage au sud de Barcelone où Messi possède toujours une résidence, les anecdotes du footballeur sur son ancienne vie quand il avait le temps de conduire ses enfants à leur école avant d’aller au centre d’entraînement du Barça, activité qu’il n’a plus le temps de faire à Paris. « Messi, l’expatrié », nous avons conclu.

Les mauvaises langues disent que le coéquipier de Messi au PSG, Neymar, aurait été surpris par la météo parisienne quand il a déménagé, troquant Barcelone pour Paris. « Il fait gris et il pleut » aurait-il découvert. Cette histoire, vraie ou fausse, semble démontrer que les footballeurs vivent isolés de tout… alors qu’en réalité ils sont des expatriés (presque) comme les autres.

« J’étais seul et je ne parlais pas la langue » confie Karim Benzema en évoquant ses premiers mois à Madrid en 2009.

La presse espagnole n’a cessé de débattre sur Gareth Bale, son co-équipier au Réal. « Parle-t-il espagnol ? Est-il ‘intégré’ ? » s’interrogeaient-ils sans cesse avant de découvrir avec stupeur que le joueur gallois donne des interviews en espagnol à Los Angeles : Bale joue désormais pour un club du championnat américain où le soccer est beaucoup suivi par la communauté latina.  

Les joueurs s’expatrient en famille. Les femmes des joueurs espagnols Iker Casillas et Sergio Ramos, respectivement journaliste et présentatrice télé, ont dû changer de travail -et travailler à distance- quand elles ont suivi leurs maris à Porto et à Paris. Le gardien costaricain du PSG Keylor Navas a demandé de l’aide sur Instagram pour trouver une place en crèche ou à l’école pour un de ses gamins. 

Depuis cet article sur Leo Messi, j’analyse la vie des footballeurs avec mon regard d’ex-expatriée. Car ils relèvent les mêmes défis que les autres expatriés. Trouver un nouveau cadre de vie. Reprendre des habitudes. Rencontrer les collègues. S’adapter aux nouvelles méthodes de travail. Communiquer, apprendre la langue ou utiliser une langue de travail commune. Scolariser les enfants dans un nouveau système. Se faire de nouveaux amis, souvent d’autres expatriés de la même communauté. Prendre racine.

Bien sûr, quand je me prête à l’exercice, je mesure aussi leurs avantages : les déménageurs, les assistants personnels, les agences immobilières, les cours particuliers, la famille qui peut suivre dans de bonnes conditions, les centaines de milliers d’euros gagnés dans un job qui est aussi une passion, les avocats et les fiscalistes qui travaillent dans l’ombre.

Mais après toutes ces années passées à regarder des matchs de football, à lire et écouter des interviews, il a fallu qu’un journaliste de El Mundo écrive un article sur Messi, pour me faire réaliser que j’avais quelque chose en commun avec eux, une expérience que je n’avais pas identifiée comme telle : être une expatriée (pas) comme les autres.

Image par Yuri de Pixabay

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